dimanche 3 juillet 2011

           POUR LA SAUVEGARDE DU PATRIMOINE DE SIDI BOU SAID


Sidi Bou Saïd (سيدي بو سعيد) est un village de Tunisie situé à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Tunis. Il compte 4 793 habitants selon le recensement de 2004[2].
Perché sur une falaise dominant Carthage et le golfe de Tunis, il porte le nom d'un saint : Abou Saïd.
Il est desservi par la ligne ferroviaire du TGM qui le relie à La Marsa et Tunis
Les Carthaginois puis les Romains auraient utilisé les hauteurs de l'actuel Sidi Bou Saïd pour y établir une tour à feu. Une mosaïque de six mètres sur cinq prouve d'ailleurs l'existence ancienne d'une villa romaine.
Au XIe siècle, les hauteurs du village sont choisies par les Almoravides pour la défense des côtes nord-est de la Tunisie. Des tours de guets et des tours à feu y sont construites. Elles donnent d'ailleurs l'appellation de la colline : Djebel Menara (« montagne du phare »).
Khalaf Ben Yahia Tamimi El Béji, né en 1156 et originaire de Béja, enseigne dans la rue qu'il habite à Tunis et qui a depuis conservé son nom. Vers la fin de sa vie, il se retire sur le Djebel Menara, dans le ribat construit sur la colline dominant le cap Carthage, pour monter la garde et y enseigner le soufisme. Il est alors surnommé « maître des mers » à cause de la protection que les marins naviguant à proximité du site pensent recevoir. Il meurt en 1231 et est enterré sur la colline. Sa zaouïa constitue sans doute le premier élément du village qui prendra son nom.
Des traces archéologiques repérées sur le versant nord laissent penser qu'un mur d'enceinte contourne alors le site.

Dès le XVIIe siècle, le charme de ce village séduit la bourgeoisie tunisoise qui y fait construire des demeures
luxueuses. Il reçoit le nom de Sidi Bou Saïd lorsqu'il devient le siège d'une municipalité en 1893[3. Le 28 août 1915, un décret est pris pour assurer la protection du village, imposant le bleu et le blanc si chers au Baron d'Erlanger et interdisant toute construction anarchique sur le promontoire[4], faisant de Sidi Bou Saïd le premier site classé au monde.
Sidi Bou Saïd est rattaché au site de Carthage, classé patrimoine mondial par l'Unesco en 1979. Toutefois, les consignes de l'Unesco cédent devant l'urbanisation qui se développe depuis Sidi Bou Saïd jusqu'à La Malga et Salammbô ; les connections électriques et téléphoniques aériennes dénaturent par ailleurs le paysage. De plus, la municipalité ne parvient pas à maîtriser le développement du souk du village.

À partir du XIXe siècle, Sidi Bou Saïd attire nombre d'artistes, musiciens et écrivains, dont Chateaubriand, Gustave Flaubert, Alphonse de Lamartine, André Gide, Colette et Simone de Beauvoir. Michel Foucault y rédige L'Archéologie du Savoir.
Les maisons de Sidi Bou Saïd qui combinent l'architecture arabe et andalouse et qui sont d'une blancheur éclatante et aux portes bleues, sont dispersées au hasard de ruelles tortueuses. Haut-lieu touristique aux couleurs de la mer Méditerranée, classé depuis 1915, le site est surnommé le « petit paradis blanc et bleu ».
Dar El Annabi, maison construite au XVIIIe siècle, a été la demeure du mufti El Annabi ; formée d'une cinquantaine de chambres et surnommée le « palais des milles et nuits », elle est transformée en musée qui présente des objets de style arabo-musulman dont une robe de mariée qui pèse 22 kilos.
Patrie de la musique, le village accueille le Centre des musiques arabes et méditerranéennes dans le palais de Rodolphe d'Erlanger. Baron franco-britannique à l'origine de la protection de la ville, il contribue grandement à la notoriété du site en revalorisant l'architecture tunisienne traditionnelle. Bénéficiant d'une décoration intérieure raffinée et d'un jardin luxuriant, le palais d'Erlanger est ouvert au public.
Sidi Bou Saïd est également réputé pour ses cafés dont les terrasses sont des lieux de détente très prisés des Tunisois :

le Café Halia (ou Café des nattes) qui abritait les soirées de malouf organisées par les mélomanes du village ;
le Café de Sidi Chebhane, voyant le jour vers la fin des années 1960, qui offre une vue unique sur le golfe de Tunis ;
le Café de la place du village qui était le domaine réservé des anciens de Sidi Bou Saïd.

La main mise de l’ex-Président et de sa famille a touché tous les domaines même celui de l’archéologie : déclassement de zones archéologiques pour fin de construction et vols de pièces de valeur du patrimoine et  leur utilisation pour l’ornementation de leurs demeures. Nous ne prétendons pas dans ce dossier être exhaustifs sur la question mais nous exposerons certaines affaires, les plus flagrantes !

Le 25 janvier 2011, apparaît sur le journal la Presse le texte de la pétition appelant à la défense du site culturel de Carthage-Sidi Bou Said qui a subi des atteintes graves causées par Ben Ali et sa famille. L’appel a été lancé par Abdelmajid Ennabli, archéologue et ancien conservateur du site de Carthage  et par Jellal Abdelkafi, urbaniste demandant la prise de mesures urgentes pour sauver le site de la défiguration et l’ouverture d’enquêtes judiciaires nécessaires pour comprendre comment les malversations ont eu lieu. La pétition évoque le déclassement d’une vaste zone du territoire archéologique pour construire un complexe immobilier aux fins spéculatives appelé «les Résidences de Carthage», la dérogation de bâtir dans des zones «non aedificandi» et l’accaparement de palais et demeures historiques ainsi que de pièces de patrimoine.
En creusant dans cette affaire, les vérités découvertes sont hallucinantes.

Déclassement de zones archéologiques à Carthage-Sidi Bou Said
Depuis 1985 et en vertu du décret 85-1246 du 7 octobre, le site Carthage-Sidi Bou Said a été classé pour son intérêt «archéologique, historique, esthétique et naturel, ce qui implique qu’il n’est plus possible d’y entreprendre des constructions de n’importe quelle nature. En 1979, il avait déjà été inscrit par l’UNESCO  dans la liste du patrimoine mondial de l’Humanité. Le site couvre une superficie de 400 ha qui comporte une zone archéologique avec des monuments et des vestiges et une large zone verte.
Un Plan de Protection et de mise en Valeur (PPMV) a été élaboré pour à la fois, conserver le site  et lui donner une vocation culturelle, touristique et sociale, afin d’en faire profiter aussi bien les Tunisiens que les touristes. Ce plan comportait plusieurs composantes dont la construction d’un parc de  sports et de loisirs à Yasmina (Kram Ouest), d’une station centrale d’accueil des visiteurs à la Maâlga, d’un parc d’attraction à la Marsa, d’une base nautique des Ports Puniques, d’une académie des Arts à Amilcar et d’un parc champêtre à El Maâlga.
Décidé depuis 1992 et finalisé en 2000, le dit plan n’a jamais pu voir le jour. Ce n’est pas faute de moyens mais à cause des obstacles mis par l’ex-Président lui-même.  En effet, son adoption a trainé plusieurs années. «Chaque fois que la commission se réunissait pour approuver le projet, le conseiller du Président, Mokhar Akkari, venait pour bloquer le processus», explique Jalel Adelkafi, urbaniste et partie prenante dans l’élaboration du PPMV.  En 2000 et suite à sa finalisation, il a été refusé mais verbalement.  Il a été transmis, ensuite à l’Institut National du Patrimoine. «Depuis, plus de nouvelles ! Quand on demandait son réexamen, la réponse était toujours : Ce n’est pas le moment !», ajoute-t-il

                                     Une partie du clan des pilleurs de la Tunisie

Mais derrière ces tentatives de tergiversation, il y avait tout un plan machiavélique de la part de Ben Ali et de certains membres de sa famille dont Belhassen Trabelsi et Sakhr El Matri. En effet, ces derniers nourrissaient des appétits grandissants pour accaparer certains terrains du site Carthage-Sidi Bou Said afin de construire des demeures personnelles ou pour les vendre à des prometteurs immobiliers à des prix faramineux.
Leurs vraies intentions n’ont pas tardé à se révéler. Deux grands déclassements ont eu lieu entre 2006 et 2007 dans la zone verte derrière le cimetière américain à Carthage. Le premier concerne le titre foncier 67 678 (superficie 9 ha) en vertu du décret de déclassement n°2416 du 4/9/2006 et le deuxième concerne le titre foncier 67 679 (superficie 2.5 ha) et le titre foncier 66  093 (1 ha) en vertu du décret n°968 de déclassement  du 17/4/2007. Ces deux déclassements d’une superficie totale de 12,5 ha et sur laquelle se situent aujourd’hui «Les Résidences de Carthage» n’ont pas été effectués dans les normes puisque cela exige la réunion d’une commission nationale interministérielle regroupant cinq ministères (la Culture, l’Intérieur, les Domaines de l’Etat, l’Equipement et l’Environnement) en plus de l’Institut National du Patrimoine (INP) et de la Mairie de Carthage. Or, cette commission ne s’est jamais réunie. «Nous avons appris le déclassement directement sur le journal officiel en voyant le décret présidentiel», affirme M. Fathi El Béjaoui, ex-conservateur du site de Carthage et actuel Directeur de l’INP.
pour acquérir les terrains. Parmi les parcelles déclassées, il y avait celle détenue par la Société Carthage Hannibal d’animation et de Loisirs, propriété d’Abdellatif Mokthar. Sa superficie est de 4.7 ha. Dans une lettre adressée au journal «La Presse» en date du 12 février,  ce dernier dit avoir subi des pressions de la part de Belhassan Trabelsi pour vendre cette parcelle, à la société d’Abdelkarim Hamila, homme d’affaires, très proche du frère de Leila Trabelsi dans le bureau duquel la transaction a eu lieu. Il dit avoir été contraint de vendre 21 dinars le m2, alors que Hamila l’a vendu à la société immobilière Férid du Groupe Ben Kamla à 600 dinars le m2.


Ce groupe assure la construction des appartements des «Résidences de Carthage» en plus de la commercialisation de lots de terrain pour l’habitat individuel. Acquérir un de ces appartements demande  une vraie fortune puisque le prix du m2 construit avoisine les 2600 dinars.
Comment le Goupe Ben Kamla a-t-il obtenu les permis de bâtir et de lotir alors que dans le PAU (Plan d’Aménagement Urbain) de la Commune de Carthage, approuvé par le décret de 2006 n° 1910 du 10 juillet 2006 cette même zone est classée comme archéologique et que ce plan n’a pas été mis à jour depuis?
La responsabilité de la Mairie de Carthage, de l’Institut National du Patrimoine (qui devait donner son autorisation)  ainsi que de celle du Ministère de la Culture est bien évidente. Si l’on suppose que les protagonistes de l’époque dans ces institutions, n’ont pas facilité la procédure, ils l’ont en tout cas permise. Et cela est grave en soi.
Une enquête sera ouverte très prochainement pour comprendre comment cette série de malversations a pu avoir lieu. En attendant,  le nouveau ministre de la Culture, M. Ezzeddine Bachaouch vient publier un arrêté le 16 février 2010 «suspendant la validité de tous les permis de bâtir relatifs aux terrains à caractère archéologique et historique dans le périmètre du Site Carthage-Sidi Bou Said, étant donné que tous ces permis, sans exception, ont été accordés illégitimement en application d’une procédure fondée sur une apparence de légalité. Aussi a-t-il été décidé d’interdire tous les travaux de construction en cours sur les terrains sus-indiqués».
Cet arrêté n’a pas été tout de suite appliqué puisque deux jours après, et à l’occasion d’une visite sur place, 


avons constaté que les travaux de construction allaient toujours bon train.


Si nous avons évoqué ces deux grands déclassements de 2006- 2007, cela ne signifie pas qu’ils sont les seuls existants. En 2005, un terrain a été déclassé afin de permettre à Sakhr El Matri de construire une résidence à Sidi Bou Said. La Sonede a dû entreprendre des travaux près du cimetière américain pour l’alimenter en eau ainsi que le palais présidentiel.

La maison d’Imed en plein site archéologique
Et la liste des abus n’est pas finie puisque Imed Trabelsi avait une maison aux abords d’un site archéologique à Carthage, là où se trouve la Villa Volière (Les villas romaines). A vrai dire, «il l’a confisquée à un étranger», raconte sa voisine mais avec la différence que lui n’a pas respecté la bordure protégeant le site. Il l’a transcendée pour en faire un jardin auquel mène un petit pont.
«J’ai planté moi-même les arbres qui composaient cette bordure  et lui,  les a enlevés en toute facilité sans demander l’autorisation de personne», explique Abdelmajid Ennabli, archéologue et ex-conservateur du site de Carthage. «Il a même installé des projecteurs pour avoir la vue la nuit sur le site à partir de son jardin», ajoute-t-  il.
Les visiteurs de ces vestiges peuvent facilement repérer la demeure qui est d’un mauvais goût malgré le luxe qu’il a essayé d’y mettre (5 étages, ascendeur, jacuzzi…). Ella  été incendiée et pillée après la Révolution.

Vol d’objets de patrimoine
L’appétit des Trabesli ne s’arrêtait pas à l’acquisition de terrains sur des zones archéologiques mais le dépassait jusqu’à l’appropriation de pièces de patrimoine.
Dernièrement, les Tunisiens ont été choqués en voyant à la télé les 130 pièces volées (colonnes, chapiteaux, statues, stèles funéraires…) et trouvées dans les demeures de Belhassan Trabelsi et de Sakhr El Matri. Quelques unes ont été même défigurées à cause de leur usage comme matériaux d’ornement de cheminée, de piscine ou de cuisine.  «Un vrai crime !», affirme Fethi El Béjaoui qui est allé sur place et qui n’a pas pu retenir ses larmes en voyant ce massacre.
Mais d’où venaient ces pièces exactement et comment ont –elles débarqué chez la famille de l’ex-Président ?
Une bonne partie provenait du dépôt de l’INP à Ksar.
Said. Or, on sait que ce dépôt a subi des opérations de vols de pièces archéologiques de 2007 à 2009. Les opérations successives d’inspections durant cette période ont révélé chaque fois des disparitions (plus de 110 pièces).  «Nous les avons systématiquement signalées à la direction de l’INP, Taoufik Redissi et moi-même, qui étions responsables de l’inventaire», indique Fathi El Béjaoui. Mais aucune réaction. A la fin, ils ont saisi le ministère de la Culture qui a entrepris  l’ouverture d’une enquête mais elle a été rapidement suspendue. Une source à la brigade spécialisée dans le patrimoine à El Gorjani nous a révélé, difficilement,  qu’il n’y a jamis eu de plaintes durant cette période.


En interrogeant certains employés de l’Institut National du Patrimoine, ils  nous ont informés qu’il y avait des opérations organisées et systématiques de pillage des différents dépôts de l’Institut sur tout le territoire et pas seulement de celui de Ksar Saïd. Elles auraient été exécutées par l’ancien responsable  par intérim du département des équipements et des constructions sur ordre du directeur de l’Institut à l’époque. Les opérations de vols se faisaient la nuit avec les camions de l’INP et le butin serait transporté directement aux demeures du clan Trabelsi.
Ce responsable a été arrêté une fois pendant trois jours pour les besoins d’une enquête policière avant d’être relâché et muté dans un autre poste en dehors de l’INP. 
D’autres pièces retrouvées chez les Trabelsi ont été amenées d’autres dépôts comme celui de Kairouan d’où provenaient certaines stèles funéraires utilisées pour orner la maison de Sakhr El Matri à Hammamet.
Pour restituer toutes les pièces volées par «la famille», l’INP compte préparer une liste de toutes les demeures des Trabelsi pour les inspecter et rapatrier les objets archéologiques trouvés, outre à lancer une enquête judicaire afin de comprendre les circonstances de leur disparition. Par ailleurs, un compte facebook a été mis à la disposition des citoyens pour informer l’Institut en cas de trouvailles d’objets dérobés.

La Karraka de la Goulette, sauvée de justesse !
Les Tunisiens devaient s’estimer heureux de la fin du règne du Ben Ali car sa famille mafieuse avait  plusieurs projets de main mise sur des sites du patrimoine. Une de leur cible a été la Karraka de la Goulette. Elle était l’objet de convoitise de deux personnages : Sakhr El Matri et Imed Trabelsi, devenu Maire de la Goulette. La compétition entre les deux avait retardé jusque là l’accaparation du monument. Fathi El Bahri, archéologue et responsable de la Karraka raconte sa rencontre avec Imed Trabelsi qui l’a convoqué en juin 2010 pour lui demander de travailler à la Mairie à temps partiel afin de préparer un plan d’aménagement de ce monument. L’objectif étant de le transformer en des magasins et une sorte de lieu d’attraction, «Dar Zamen». El Bahri a refusé l’offre et ce fut le début de la confrontation. Car en août, des ouvriers de la Municipalité sont venus construire une plate forme en ciment  sur le toit et implanté un drapeau, sans autorisation et en entrant illégalement dans les lieux. «Je suis allé porter plainte à la Marie qui ne m’a pas donné d’explications pour cette intervention. J’ai averti  la direction de l’INP. Pas de réaction non plus», poursuit-il. Peu de temps après, la Mairie a concédé la cour devant le monument à un privé pour son exploitation durant tout l’été comme café en plein air. «Et on pourrait s’attendre au pire s’il n’y avait pas eu la révolution !», indique l’archéologue. Il rappelle par ailleurs qu’un homme d’affaires tunisien avait eu l’accord de l’INP afin de transformer La Karraka en un musée retraçant l’histoire de la Tunisie à travers la céramique, tout en s’engageant à permettre la poursuite des fouilles. Il devait signer une convention dans ce sens avec le Ministère de la Culture. Cela n’a jamais eu lieu à cause des convoitises des Trabelsi.
C’est dire l’étendue de leur avidité et leur appétit insatiable !
Un grand travail d’investigation doit être mis en place rapidement pour dénoncer tous les abus qui ont eu lieu dans le domaine du patrimoine. Des vérités extraordinaires nous seront certainement révélées.

                            Le Palais de la honte du voleur Sakhr El Materi à Sidi Bou Said


BEN ALI: SON PALAIS DE SIDI DHRIF, UN COFFRE-FORT GÉANT

Une partie de l’immense fortune de Ben Ali a été mise au jour par la télévision tunisienne depuis le Palais de Sidi Dhrif, à Sidi Bousaïd, comprenant notamment des centaines de liasses de billets divulguées -entre autres- derrière une fausse bibliothèque, et des bijoux luxueux.

En 2008, le magazine «Forbes» avait estimé la fortune de Zine el-Abidine Ben Ali à 5 milliards de dollars. William Bourdon, président de l’association Sherpa et avocat de Transparence Internationale France, l’évalue lui entre 5 et 10 milliards, «répartis entre l’Amérique latine, le Canada, le Golfe et l’Asie du Sud-Est», avait-il confié le mois dernier au «Monde». Les Tunisiens en ont aperçu une infime partie, mais néanmoins impressionnante, à la télévision nationale samedi soir au journal de 20 heures: des images du Palais de Sidi Dhrif, sur la colline de Sidi Bousaïd, une banlieue huppée située à environ 15 kilomètres au nord de Tunis ont en effet montré la quantité incroyable de cash que l’ancien tunisien dissimulait ici –et sans doute ailleurs…-, mais aussi de bijoux et autres objets précieux. La découverte a été faite presque par hasard par les démineurs tunisiens, selon l’envoyé spécial d’Europe 1 en Tunisie. Alors qu’ils inspectaient cette résidence –parmi tant d’autres-, à la recherche d’éventuelles bombes «les militaires ont soudain vu leurs détecteurs de métaux s’affoler dans la bibliothèque», rapporte la radio.

La bibliothèque s’est avérée être une fausse: derrière cette façade se trouvaient des centaines de liasses de billets – des dinars tunisiens mais aussi et surtout des coupures de 500 euros et des dollars. Des parures serties de diamants, de rubis et autres pierres précieuse, des montres de grand luxe, des ceintures en or massif ainsi ou encore des bouteilles de vins millésimées étaient par ailleurs répartis un peu partout dans le palais. La valeur du tout a été estimée à 175 millions d’euros. Selon le site Leaders Tunisie, citant un communiqué de la Banque centrale de Tunisie (BCT), le liquide représentait une somme d’environ 41 millions de dinars (21 millions d’euros). La BCT préciserait que les bijoux ont été placés auprès du Trésor Public, les billets réceptionnés par les services de la Banque pour authentification, comptage et mise en sécurité. De même source, une liasse de billets de 100 dollars américains comportait un faux billet de 100 dollars et deux billets de 10 dollars, au lieu de 100 dollars. La saisie a été effectuée en présence de représentants de la commission nationale d’investigation sur la corruption et les abus de l’ancien régime, et d’huissiers. Le président de cette commission, le juriste Abdelfattah Amor, a assuré que cette «fortune» serait «déposée dans les coffres de la Banque centrale tunisienne et, après les procédures légales», retournera «au peuple tunisien». Selon Euronews, les sommes devraient servir au financement de projets dans les régions défavorisées de la Tunisie intérieure.
Le clan Ben Ali a construit sa fortune via divers montages financiers et arnaques immobilières, comme le décrivent dans le détail les journalistes Nicolas Beau et Catherine Graciet dans leur livre «La régente de Carthage. Main basse sur la Tunisie». Les privatisations des années 1990 et 2000, notamment, ont été l’occasion pour eux de mettre la main sur des pans entiers de l’économie tunisienne. Selon les autorités financières tunisiennes, le clan Ben Ali possédait 90 entreprises et avait des participations dans 123 autres. Le président en fuite et sa femme, la détestée Leïla Trablesi, sont poursuivis pour «acquisition illégale de biens mobiliers et immobiliers» et «transferts illicites de devises à l’étranger». La Suisse a été la première à geler les avoirs de la famille, suivie fin janvier par l’Union européenne. La Tunisie a demandé hier à l’Arabie saoudite l’extradition de l’ancien dictateur afin qu’il réponde de ses actes. Mais il se pourrait qu’il ne soit jamais jugé. Ben Ali est hospitalisé depuis une semaine à Djeddah après avoir fait un arrêt vasculaire cérébral. Alors que des sources l’ont dit mort dimanche –dont le webzine d’opinion israélien JSSNews- le journaliste spécialiste de la Tunisie Nicolas Beau –qui a révélé son AVC-, annonce sur son blog qu’il est au contraire «sorti de son coma» samedi. «Ben Ali serait même sorti de son hôpital samedi transporté sur un brancard, vers une destination inconnue», précise des sources fiables à Paris et Tunis, sur son blog. http://nicolasbeau.blogspot.com/ Selon le professeur Mohamed Gueddiche, médecin de longue date des Ben Ali interrogé par l’ancien du «Monde», le cancer de la prostate de l’ex-président n’aurait même «jamais existé». Il aurait «juste eu quelques adénomes de la prostate, comme tout homme de plus de cinquante ans, soignés par quelques médicaments, là encore comme tout un chacun. Sinon, son état de santé serait parfait, ni cholestérol, ni tension, juste quelques grippes.»
Samedi, Jonathan-Simon Sellem, ancien journaliste et diplomate, qui a notamment travaillé au Ministère des Affaires étrangères israélien, et vit en Israël, était pourtant très précis dans ses informations. Citant des «diplomates tunisiens en poste en Europe de l’Ouest», il affirmait que Ben Ali «serait mort à 22h30, dans la nuit de vendredi à samedi» et que «des négociations seraient en cours avec le gouvernement de Tunis afin qu’il soit autorisé à être enterré en Tunisie». Les mêmes sources auraient affirmé que «Ben Ali serait mort cliniquement depuis 24 heures», c’est-à-dire avant sa mort physique. Sa femme, Leila Trabelsi, aurait, «depuis Tripoli, en Libye, donné le feu vert pour [le] débrancher.» Selon JSS News, celui qui a été chassé du pouvoir le 14 janvier à l’issue de près d’un mois de manifestations sans précédent dans le pays, «serait mort seul. Pas un seul membre de sa famille n’aurait daigné venir le visiter en Arabie Saoudite alors que tous savaient qu’il vivait ses derniers moments».

Ben Ali louait à l’État son propre palais de Sidi Dhrif pour beaucoup plus de 50 millions !


Drôle de pratiques que celles entreprises par le président déchu afin de soutirer le maximum d’argent au contribuable. En plus des exactions et des malversations sur les finances d’institutions étatiques, tous les moyens étaient bons pour lui et son entourage pour ramasser et amasser le maximum d’argent possible.
Au mois de février dernier, il a été annoncé que Ben Ali louait son palais de sidi Dhrif à l’État tunisien pour la somme de 50 millions par mois. En contrepartie, bien sûr, la Tunisie laissait Ben Ali squatter le château aux frais du peuple.
Jeudi dernier, l'hebdomadaire Al Akhbar, citant une source du ministère des Finances, Kamel Mathlouthi, a dévoilé un nouveau montant, vraiment faramineux, du loyer du palais de Sidi Dhrif.
Ce château des mille et une nuits était loué pour la somme rondelette de 300 millions de millimes par mois, soit six fois plus qu'il avait été indiqué. Acquis par Ben Ali en 1996, cela donne un total de 54 milliards payés par l’État et empochés par le président déchu.
À signaler que cette œuvre féérique, s’étendant sur un terrain de 18 hectares, comporte de multiples espaces et pavillons, les uns réservés pour les plaisirs de la Cour et les beuveries, les autres pour les «accessoires» du quotidien comme ces hangars pour la dizaine de voitures de luxe, ou ce mini zoo pour des chiens d’espèce rare et surtout une étable pour le cheval de race de Halima. Une horde animale nécessitant la présence d’un vétérinaire et d’une équipe d’entretien, et ce, toujours aux frais de la princesse…